Villepin se reconvertit dans la critique littéraire

"Je sais bien que mes idées n'intéressent personne. Mes sondages pitoyables en témoignent, à mon grand dam ! Voici pourquoi j'ai décidé d'embrasser la carrière de critique littéraire. Pour entamer cette reconversion, j'ai choisi un livre qui me tient particulièrement à coeur... parce que l'on y parle de moi en des termes fort aimables. Et de mon meilleur ennemi, en des termes fort désobligeants. Il s'agit de la 3ème chronique du règne de Nicolas 1er, dont il ne m'a pas échappé que vous avez récemment encensé la 5ème  ici-même.
Voilà une lecture qui me met du baume au coeur chaque année, et que j'encourage les Français à lire de toute urgence. C'est la  la 3ème chronique du règne de Nicolas 1er de l'académicien Goncourt Patrick Rambaud. Dans le premier tome, Chronique du règne de Nicolas 1er, Rambaud donnait déjà toute la mesure de son talent et de sa faculté à distinguer le bon grain de l'ivraie, l'homme d'état de l'imposteur, l'honnête homme du parvenu. J'en veux pour preuve ce portrait très fidèle de ma personne : "Tout séparait Sa Majesté de M. le duc de Villepin. Celui-ci était un grand homme bien fait, avec un grand nez, des mèches prématurément blanches et fournies, et une physionomie telle qui ne se pouvait oublier quand on ne l'aurait vue qu'une fois : elle avait de la gravité et de la galanterie, du sérieux et de la gaieté ; ce qui y surnageait, ainsi que dans toute sa personne, c'était la finesse, l'esprit et surtout la noblesse... avec cela un homme qui ne voulait jamais avoir plus d'esprit que ceux à qui il parlait, sauf s'il parlait à Sa Majesté qu'il ressentait comme son exact contraire."

Le troisième opus est dans la même veine. Le fanfaron de l'Elysée y est, une fois encore, habillé pour l'hiver. Dès l'exergue de l'ouvrage, avec une citation de Napoléon le Petit de Victor Hugo : "Ceux qui ont peur, la nuit, chantent, lui, il remue. Il fait rage, il touche à tout, il court après les projets , ne pouvant créer, il décrète." Rambaud lui donne à chaque page de nouveaux surnoms ridicules à souhait. "Sa Phosphorescente Majesté" pour railler son goût de la parade ; "Notre Tressautant Leader" pour moquer ses tics, ou, pour noter sa popularité en berne, "Notre Adulé Souverain".

Qui se ressemble s'assemble... Les portraits des parvenus qui composent sa garde rapprochée ne manquent pas de sel. Leur proximité de moeurs et d'allure avec leur grand homme est saisissante. De véritables portraits en creux du Nabot. Celui de Pierre Charon, son conseiller politique, autrement dit son valet de chambre, est un morceau d'anthologie. "M. de Charon avait l'apparence massive, lourdaude et rondouillarde d'un grossiste en charcuterie ; son rang se devinait surtout à ses Weston cirées comme des miroirs, car il n'avait point besoin de se crotter au-dehors étant déjà tout crotté au-dedans. Un temps mis à l'écart par l'ancienne impératrice Cécilia, laquelle le traitait de gros inutile, ce fut lui qui lâcha dans les gazettes les déboires de son nouvel époux, pour l'atteindre, elle."

Finalement, avec ses grands airs de pimbêche et son visage dur, sa Cécilia avait plus de classe que sa top modèle de Carlita, toute en minauderie. A l'époque de leur attelage improbable, l'entourage du "Gigotant Monarque" comptait des profils plus recommandables. Un dont je me rappelle comme si c'était hier, c'est le jeune Martinon. Un protégé de Cécilia, dont "Notre Souverain Eternel" fit son porte-parole puis son martyre. Allant jusqu'à le traiter d'imbécile devant une caméra indiscrète. Après qu'il ait arrangé une interview avec une journaliste américaine, qui n'était pas là pour faire tapisserie. Contrairement à la plupart de ses confrères français. Ainsi, mal briefé par l'infortuné Martinon, cette dernière eut l'outrecuidance de poser au Fielleux une question sur sa vie privée, au motif qu'il l'étalait sur la place publique à la moindre occasion."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire